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Thème 3 - Justice

Responsable : Vincent MARTIN

I. La justice : définition et perspectives scientifiques

Dans le cadre de ce projet en vue de la direction de l’axe « justice » du CUREJ, la justice est entendue très largement, en suivant la définition traditionnelle et distributive selon laquelle la justice est l’art d’« attribuer à chacun le sien ». Cela suppose en particulier de s’intéresser aux acteurs qui concourent à cette mission, à leur statut et à leur oeuvre, ainsi qu’aux règles procédurales qui encadrent leur action. Ainsi largement entendue, la thématique de la justice concerne tous les pans académiques du droit (droit privé, droit public, histoire du droit), ainsi que les sciences politiques.

Depuis longtemps déjà, la thématique de la justice revêt un intérêt fondamental. Aujourd’hui comme hier, étudier les institutions chargées de rendre justice et les procédures qui régissent les contentieux, appréhender également la mise en oeuvre, devant les juridictions, des règles juridiques, est une oeuvre indispensable pour mieux réfléchir aux évolutions du droit. Au-delà et depuis de longs siècles déjà, la justice est regardée comme la condition sine qua non de toute paix véritable au sein du corps social, un enjeu éminemment politique qui justifie de placer cette thématique à la confluence des sciences juridiques et politiques.

Au-delà, la thématique de la justice revêt aujourd’hui un intérêt tout particulier en raison de la conjoncture actuelle. En effet, l’organisation des institutions judiciaires et leur fonctionnement ont connu ces dernières années de profondes mutations. De fait, depuis déjà de longues années, le législateur porte son attention sur l’administration de la justice, ainsi qu’en atteste encore tout dernièrement le projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire. On songe à la réforme de professions judiciaires emblématiques, avec la disparition des avoués depuis 2012, ou encore la naissance de la profession de commissaire de justice, résultant de la fusion des métiers d’huissier et de commissaire-priseur judiciaire, effective à partir de 2022. L’organisation juridictionnelle rencontre aussi des mutations, avec la mise en place récente d’un tribunal judiciaire, effective depuis 2020, qui opère la fusion du Tribunal d’Instance et du Tribunal de Grande Instance, ou l’expérimentation actuelle, dont la généralisation est d’ores et déjà prévue, dans plusieurs départements et depuis 2019, d’une Cour criminelle départementale venant se substituer, dans certains cas, à la Cour d’assise. Le parquet est également l’objet de réformes visant à le spécialiser toujours davantage, et l’on songe aux discussions sur son indépendance, régulièrement présentes dans les débats politiques. On sait enfin, par exemple, que la déontologie et la discipline des officiers publics et ministériels fait l’objet d’une attention particulière. On ne peut pas ignorer par ailleurs le développement des modes alternatifs de règlement des conflits dans divers pans du droit (médiation civile, médiation et composition pénales, etc.), qui mène à la mise en place d’un système renouant avec des logiques déjà présentes dans l’ancien droit. Enfin, l’évolution rapide des règles de fond dans certains domaines, comme le droit pénal ou le droit du travail, mérite une réflexion approfondie quant à leur mise en oeuvre devant les juridictions.

Ainsi, étudier la justice mène à s’intéresser à des institutions et des normes évolutives, mais confronte également le chercheur à des institutions et des procédures qui, pour certaines, obéissent à des principes très anciens, quasi immuables, qui puisent parfois, au-delà du legs des périodes les plus récentes, dans l’héritage de l’ancienne France. À la lumière de ce constat, il semble essentiel de réfléchir à la justice sous le prisme des permanences et des mutations.
Afin d’ordonner les travaux, trois sous-thématiques sont envisagées, qui transparaissent dans les idées précédemment avancées :

1. Permanences et mutations des institutions et métiers de la justice
2. Permanences et mutations des modes de règlement des conflits
3. Permanences et mutations des normes

II. Les évènements scientifiques

Pour faire vivre la recherche autour de ces différentes thématiques, classiquement, deux types d’initiative sont envisagés. Il s’agirait d’abord d’organiser dans les deux ans à venir un colloque ou, à la rigueur, deux journées d’étude réparties sur les deux ou trois prochaines années. Dans ce cadre, il serait possible d’envisager un premier évènement autour de la thématique « justice imposée / justice négociée », qui mènerait à une réflexion collective autour des modes de règlement des conflits. Si la thématique n’est pas neuve, elle n’en reste pas moins actuelle et évolutive, et justifierait à ce titre un nouvel effort de réflexion.

Par ailleurs, il s’agirait de mettre en place, chaque année, un cycle de séminaires qui nourrirait l’une des sous-thématiques envisagées. Chaque séminaire pourrait être animé autour d’une conférence faisant intervenir des enseignants-chercheurs de Rouen ou d’ailleurs, ou bien des professionnels. L’idée serait de varier les spécialistes invités, avec une alternance entre des intervenants en droit privé, droit public, histoire du droit et science politique. Ce faisant, on contribuerait à faire vivre la pluridisciplinarité de l’axe, en permettant d’entrevoir des thèmes communs depuis des points de vue très différents. A minima, un séminaire par semestre serait organisé, davantage si possible, jusqu’à deux par semestre dans l’idéal.
L’idée est de construire collectivement les projets futurs. Cela impliquerait, de façon régulière, de discuter avec les collègues intéressés des projets concrets à envisager, en réfléchissant ensemble aux thèmes à aborder lors des futurs évènements scientifiques. À cet égard, la problématique « justice imposée / justice négociée » évoquée précédemment est une thématique parmi d’autres qui constituerait une simple entrée en matière.